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Les choses dont nous avons parlé en dernier lieu ont, comme toutes celles qui appartiennent essentiellement au monde moderne, un caractère foncièrement antitraditionnel ; mais en un sens elles vont encore plus loin que l’« antitradition », entendue comme une négation pure et simple, et elles tendent à la constitution de ce qu’on pourrait appeler plus proprement une « contre-tradition ». Il y a là une distinction semblable à celle que nous avons faite précédemment entre déviation et subversion, et qui correspond encore aux deux mêmes phases de l’action antitraditionnelle envisagée dans son ensemble : l’« antitradition » a eu son expression la plus complète dans le matérialisme qu’on pourrait dire « intégral » tel qu’il régnait vers la fin du siècle dernier ; quant à la « contre-tradition », nous n’en voyons encore que les signes précurseurs, constitués précisément par toutes ces choses qui visent à contrefaire d’une façon ou d’une autre l’idée traditionnelle elle-même. Nous pouvons ajouter tout de suite que, de même que la tendance à la « solidification », exprimée par l’« antitradition », n’a pas pu atteindre sa limite extrême qui aurait été véritablement en dehors et au-dessous de toute existence possible, il est à prévoir que la tendance à la dissolution, trouvant à son tour son expression dans la « contre-tradition », ne le pourra pas davantage ; les conditions mêmes de la manifestation, tant que le cycle n’est pas encore entièrement achevé, exigent évidemment qu’il en soit ainsi ; et pour ce qui est de la fin même de ce cycle, elle suppose le « redressement » par lequel ces tendances « maléfiques » seront « transmuées » pour un résultat définitivement « bénéfique », ainsi que nous l’avons déjà expliqué plus haut. D’ailleurs, toutes les prophéties (et bien entendu, nous prenons ici ce mot dans son sens véritable) indiquent que le triomphe apparent de la « contre-tradition » ne sera que passager et que c’est au moment même où il semblera le plus complet qu’elle sera détruite par l’action d’influences spirituelles qui interviendront alors pour préparer immédiatement le « redressement » final ; il ne faudra, en effet, rien de moins qu’une telle intervention directe pour mettre fin, au moment voulu, à la plus redoutable et à la plus véritablement « satanique » de toutes les possibilités incluses dans la manifestation cyclique ; mais sans anticiper davantage, examinons un peu plus précisément ce que représente en réalité cette « contre-tradition ».
« Parmi les diverses attitudes « réactionnaires » les plus dignes d’intérêt adoptées en face du monde moderne, une place à part doit être faite à celle dont, en France, René Guénon est le représentant. Par le sérieux et la sûreté de ses jugements, par ses connaissances vraiment exceptionnelles en matière de traditions religieuses, de mythes et de symboles et, plus spécialement, de doctrines orientales, par son constant souci de considérer les choses dans le moindre détail tout en conservant un point de vue synthétique, l'œuvre de Guénon ne doit pas être comparée à celle d'auteurs qui ont pu traiter de problèmes similaires - comme, par exemple, un Massis, un Benda ou un Keyserling -, même si leurs œuvres peuvent avoir éveillé davantage d'écho parmi un public superficiel à prétentions littéraires.

Né à Blois en 1886 et enterré au Caire sous le nom d'Abd el-Wâhed Yahiâ en 1951, René Guénon est l'homme par qui le scandale arrive. Il dénonce la décadence de l'Occident moderne, fruit d'une lente dégénérescence de son héritage métaphysique et se tourne, au grand dam des catholiques, vers l'Orient devenu, selon lui, le refuge ultime de la “Tradition”.
« [...] Frédéric II Hohenstaufen, sorte de surdoué, très tôt orphelin de père et de mère, virtuose des techniques de combat, intellectuel formé à toutes les disciplines, doté de la bosse des langues vivantes et mortes, se …verra refuser d’abord la dignité impériale par l’autocrate Innocent III : « C’est au Guelfe que revient la Couronne car aucun Pape ne peut aimer un Staufer ! » Ce que le Pape craint par-dessus tout c’est l’union des Deux-Siciles (Italie du Sud) et l’Empire germano-italien, union qui coincerait les États pontificaux entre deux entités géopolitiques dominées par une seule autorité. Frédéric II a d’autres plans, avant même de devenir Empereur : au départ de la Sicile, reconstituer, avec l’appui d’une chevalerie allemande, espagnole et normande, l’œcumène romano-méditerranéen.