Rien n’incline davantage à la passion que les questions morales. Ce glissement du principe vers la passion n’est pas sans dangers : tous les fanatismes naissent de cette conviction ardente en la justesse universelle de nos principes. Il semblerait que nous devenions dévastateurs et cruels à mesure que nous nous persuadons de l’excellence de nos bons sentiments et du bon droit que des bons sentiments nous confèrent à juger du Bien et du Mal. Le mal que nous infligeons à autrui est d’autant plus terrible qu’il s’inflige au nom du Bien. Il y a dans la morale des moralisateurs, dans la « moraline », pour reprendre le mot de Nietzsche, un élan à la fois vil et prédateur que la volonté de puissance la plus soutenue n’atteint que rarement.
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Collin Cleary : « Comment invoquer les dieux »
Arrêtons-nous et examinons à quels moments ─ à quelles occasions nous avons le sentiment de la réalité de ce qui est autre. Les meilleurs exemples sont quand les choses tombent en panne ou trompent nos attentes d'une façon ou d'une autre. C'est ainsi que Heidegger approche la question. Nous montons dans notre voiture pour commencer une journée chargée, faire des affaires et faire les courses ─ et nous découvrons qu'elle ne démarre pas. Mon expérience de telles situations est qu'il y a d'abord un sentiment de quasi « irréalité ». Nous avons envie de dire (et nous disons souvent) : « Je ne peux pas y croire ». Et soudain l'être de cette concaténation de métal et de plastique nous confronte à toute sa facticité frustrante. Une situation encore pire survient quand le corps tombe malade, quand soudain il ne fonctionne pas comme nous l'attendons. Le corps nous semble alors être un simple autre. Ces deux situations, et toutes les autres comme elles, sont des occasions où une chose qui a été prise comme allant de soi semble soudain s'affirmer toute seule. Ce qui avait été regardé comme un simple instrument, comme une extension de la volonté humaine, devient un être en soi. Le résultat est de la frustration, de l'étonnement, de la fureur, et quelque chose comme du respect.
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Julius Evola : « L'Homme intégral »
Comme l'a bien remarqué Werner Sombart, l'Homo œconomicus, l'homme purement économique est un mythe, ça n'existe pas. Il existe l'Homme intégral. Et selon la formation intérieure de cet Homme intégral une certaine économie prend forme, alors il n'y a pas absolument de sens de porter le problème à la périphérie. C'est-à-dire sur le plan des problèmes économiques. La vrai question est de centrer l'Homme. De favoriser cette forme radicale de l’attitude humaine, dont la conséquence naturelle sera le changement du système économique.
Julius Evola ─ Archives du XXe siècle (1971)
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